(Article initialement publié en 2014)
La « note de l’éditeur », la préface et
« l’avertissement au lecteur, préliminaires et conseils pratiques »
augurent bien du contenu : ce livre est aussi difficile à lire qu’il a du
l’être à écrire. L’auteur mérite donc d’être félicité.
Il s’agit d’une compilation de textes législatifs à l’usage
des professionnels des 3D (Dératisation-Désinsectisation-Désinfection), ou PCO
(pour l’anglicisme Pest Control Organisation), présentée comme une
« synthèse ».
Sur dix chapitres, deux sont consacrés aux techniques de
lutte contre des animaux responsables de nuisance et débordent donc de l’objet
initial.
Les huit autres chapitres abordent les thèmes
suivants :
-
Statut des
espèces animales, aspects règlementaires et sociaux ;
-
Aspects
règlementaire de la lutte contre les animaux déclarés nuisibles ;
-
Espèces
protégées et espèces nuisibles ;
-
Agrément
et piégeage ;
-
Questions
pratiques. Ce chapitre est de loin le plus intéressant, même si la majorité
des questions ne concernent pas le quotidien de la plupart des professionnels ;
-
Présentation
des entités de lutte collective ;
-
Élimination
de cadavres d’animaux ;
-
Obligations
de lutte contre les animaux nuisibles.
Plusieurs annexes plus ou moins en rapport direct avec les
besoins de la majorité des professionnels complètent l’ouvrage (la
« présentation succincte du droit français » et « La convention
de Berne » sont d’un intérêt très relatif).
Ce livre démontre en tous cas que le métier de PCO, qui n’a
toujours pas de filière de formation initiale et une certification
professionnelle pertinente, est quasi étouffé sous des strates règlementaires
dont la complexité et la vacuité ne peuvent qu’inciter à la résignation et la
philosophie (ah ! Le « statut » des pigeons et des rats…).
Concrètement, quelle est l’utilité de ce livre pour un
PCO ? A notre sens, d’avoir sous la main, plutôt qu’en collection de liens
sur un navigateur Internet, un ensemble de textes auxquels se référer à
l’occasion d’un problème particulier (litige, devis spécifique…). Car l’essentiel
du contenu ne concerne pas la majorité des entreprises de 3D, qui ne pratiquent
ni le piégeage, ni la capture d’animaux errants, ni la lutte contre les lapins
de garenne et les sangliers... Autrement dit, ce livre comptera rapidement plus
de poussière sur sa tranche que de pages écornées par des consultations
fréquentes.
Nous savons que l’auteur, qui nous a vertement assuré de son
inimitié, lit notre blog. Qu’il soit néanmoins assuré de notre indulgence,
telle qu’il la réclame en avertissement pour les lecteurs qui relèveraient
« une omission ou imprécision dans son
propos ». Sans doute trouvera-t-il dans les lignes suivantes matière à
réviser/compléter son ouvrage lors d’une prochaine édition.
Il ne figure pas grand-chose sur les produits biocides et
phytopharmaceutiques et les éléments permettant de les distinguer, et les
différences entre un produit réservé aux professionnels certifiés et un autre
réservé au grand public. L’auteur invite certes le lecteur à se référer aux
sites Internet des ministères concernés, mais on aurait bien aimé une synthèse
pratique de leur contenu…
Et tant qu’à y être, un topo sur le déchiffrage d’une
étiquette commerciale et d’une Fiche de Donnés Sécurité (FDS).
Il n’est pas fait mention de l’arrêté du 26/04/88 consolidé
le 28/05/99, sur les lieux d’application des rodenticides. Ce texte dispose que
les produits les plus toxiques ne peuvent être utilisés qu’à l’intérieur
« et si nécessaire aux abords immédiats ». Aucune jurisprudence ou
note ministérielle ne précisant la notion « d’abords immédiats », il
aurait été intéressant de connaître les commentaires de l’auteur sur ce point
éminemment pratique.
Il n’est pas fait mention de l’avis ministériel sur le texte
n° 79 de janvier2003 abrogé. Cet avis ministériel concerne les collectivités
locales, les établissements publics administratifs, industriels ou commerciaux,
les entreprises publiques et les services de l’Etat. Il indique que lorsque ces
structures facturent des prestations de lutte contre les nuisibles, ou
fournissent à titre onéreux ou gratuit des produits « antiparasitaires à
usage agricole ou assimilés », il convient qu’elles soient agréées,
autrement dit, qu’elles comprennent un ou plusieurs certifiés du feu DAPA.
Lorsqu’elles utilisent ces produits pour leur propre compte,
elles sont dispensées d’agrément. Elles peuvent donc acheter et utiliser des
produits réservés aux professionnels certifiés.
Le Décret n° 2011-1325 du 18 octobre 2011 relatif à
l’agrément des professionnels, qui abroge officiellement le texte n°79 de 2003,
remplace les produits « antiparasitaires à usage agricole ou
assimilés » par les produits phytosanitaires et biocides, et le DAPA par
Certiphyto. Comme il ne mentionne toujours pas le cas des non professionnels
qui achètent des produits toxiques pour leur usage privé, en tout état de
cause, l’avis ministériel pose une doctrine toujours valable. N’importe quelle
entité commerciale a donc le droit d’utiliser des biocides pour son propre compte.
Ne sont pas cités les articles de la loi sur l’eau qui
concernent directement les applicateurs de produits biocides, puisque le rejet
dans l’eau ou sur ses rivages, même accidentel (à l’occasion d’un accident de
la route, par exemple), de molécules biocides, est passible de poursuites
judiciaires. D’où des précautions particulières pour le traitement des berges
de voies et plans d’eau, par exemple.
Il n’est pas cité (et donc commenté) l’arrêté du 27/06/11
sur l’interdiction d’utiliser des produits phyto « à moins de 50 mètres des bâtiments d’accueil ou d’hébergement des
personnes vulnérables situés au sein des établissements mentionnés au II de
cette même annexe, sans que cette interdiction s’applique au-delà de la limite
foncière de ces derniers ».
Il n’y a rien sur le transport et le stockage des produits
biocides et phytos, et peu de choses sur les contrôles et sanctions relatifs à
l’utilisation professionnelle des produits biocides et phyto. Si le chapitre
sur le traitement des cadavres d’animaux est très complet, il n’y a rien sur le
traitement des déchets que sont les bidons de produits vides et les fonds de
pulvérisateurs…
En matière d’hygiène alimentaire et industrie
agroalimentaire, il n’est pas cité le code de la santé publique, dont plusieurs
articles concernent la lutte contre les nuisibles, ni la règlementation CE
« Food Law » et la note de service du 06/12/12 de la DGAL sur le
« Plan de lutte contre les nuisibles ».
Il y a belle lurette que l’HACCP n’est mentionné qu’en loin
et de plus en plus rarement dans le milieu professionnel, puisque toutes les
règlementations qui le concernent imposent des bonnes pratiques d’hygiène (BPH)
et une politique de traçabilité qui recouvrent l’HACCP. Que ce soit dans les
Plan de Maîtrise Sanitaire (PMS) ou Paquet Hygiène (qui ne concerne pas tout le
monde), la notion de démarche HACCP est incluse dans un large contexte « traçabilisé ».
D’ailleurs, dans l’IAA (Industrie Agro Alimentaire), le
respect des normes internationales (AIB, BRC, IOP, IFS et ISO-TS 22K), dispense
depuis longtemps les professionnels d’avoir un manuel HACCP. Nous pensons qu’un
prestataire 3D néophyte qui prospecterait une grosse IAA en arguant d’une
démarche HACCP se ferait rire au nez par le responsable Qualité qui
l’accueillerait… Une synthèse des articles communs sur la lutte contre les
nuisibles des normes citées plus haut aurait, nous semble-t-il, été
intéressante vu l’objet du livre.
Enfin, il n’y a rien sur les PPRP (Plan de Prévention des
Risques Professionnels) et le Document Unique, exigences règlementaires qui ont
matière à être alimentées avec les dangers et risques pour la santé et
l’environnement que présente l’utilisation de produits biocides.
Il se trouve que tous les éléments que nous venons d’exposer
(et bien d’autres) figurent dans notre prochain livre à paraitre, d’ici
quelques semaines, aux éditions Lexitis « Guide de lutte raisonnée contre
les nuisibles urbains » (616 page).
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