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lundi 17 juillet 2017

Grippe aviaire : Le coupable est identifié



Michael Coston, sommité mondiale de la grippe, vient d’établir un historique  des mutations du virus depuis le premier H1N1 jusqu’au récent H7, en soulignant que la variante H2N2, relativement ancienne (1898 et 1957), est toujours présente dans la nature, sur des rats musqués sibériens.

Voilà qui rappelle les études asiatiques au sujet des oiseaux migrateurs, qui sont contaminés par le virus sur leurs points de repos et d’abreuvement, probablement par les rongeurs présents en ces endroits ; rongeurs dont il a été démontré la très grande sensibilité au virus de la grippe (voir le précédent article de ce blog sur la grippe aviaire).

Apparemment, seuls les russes procèdent à des prélèvements sur les rongeurs infestant les points d’eau fréquentés par les oiseaux. Et ils ont donc trouvé que les rats musqués sont un réservoir du virus…

Voilà où nous en sommes : Tandis que les asiatiques travaillent sur les tenants et aboutissants de la grippe aviaire, en disculpant les oiseaux et en ciblant les rongeurs, l’Europe bat l’air en imposant vide sanitaire et désinfection des élevages avicoles, sans s’occuper le moins du monde de ce qu’il se passe dans la faune murine des rivières et points d’eau fréquentés par les oiseaux.

Pourquoi ne pas profiter de la lutte, coordonnée par les préfectures, contre le rat musqué et le ragondin, pour faire des prélèvements sur des cadavres ?

Pourquoi ne pas profiter des dératisations obligatoires des élevages avicoles, pour là aussi faire des prélèvements sur des cadavres de rats et souris ?

Quand se décidera-t-on enfin à faire des prélèvements sur les rongeurs sauvages, notamment le rat musqué, aujourd’hui présent dans une grande partie, si ce n’est toute, de l’Europe ?

Pourquoi aucun buzz en Europe au sujet des articles asiatiques qui cernent les vrais coupables de la grippe aviaire ?

Mais à qui donc profitent ce silence assourdissant et cette inertie ? A qui ???

Pierre Falgayrac

dimanche 16 juillet 2017

Affamer les rats new-yorkais, vraiment ?



Décidément, s’il y avait encore besoin de démontrer que la lutte contre les rats à New-York est sources de profits, financier pour certains et électoral pour d’autres, les dernières actualités sur le sujet enfoncent le clou.

Commençons par une énième étude sur la dangerosité sanitaire des rats d’égout, avec une information montée en neige pour faire peur sensibiliser les populations à l’impérieuse nécessité de surveiller les microbes que trimballent les rats. C’est ici : https://entomologytoday.org/2015/03/02/fleas-that-could-potentially-carry-plague-found-on-new-york-city-rats/. C’est que des puces potentiellement vectrices de peste ont été trouvées sur des surmulots… Fort heureusement, la bactérie pesteuse manque à l’appel, ouf !
Précisons : Xenopsylla cheopis, vectrice de bactérie Yersinia pestis, est la puce inféodée aux rats noirs et gerbilles du désert. Elle parasite aussi des écureuils et chiens de prairie du sud-ouest américain (alors que NYC est au nord-est).

Plutôt que de conclure « les responsables de la santé publique devraient surveiller de près les rats de la ville et leurs puces (…) et que les citoyens devraient utiliser les pratiques sanitaires pour se protéger » (ce qui est l’assurance de contrats juteux pour quelques laboratoires, et de voix pour un candidat qui s’engagera sur ce thème), il me semble que la question à se poser est : Comment des puces de zones chaudes et sèches, inféodées à des rats et des écureuils grimpeurs, peuvent-elles se retrouver dans le pelage de surmulots aux mœurs souterraines, dans des zones fraiches et humides ?

Surtout que le mode de passage des puces  d’un hôte principal (l’animal) à un hôte secondaire (un autre animal ou l’homme) est connu depuis longtemps : ou il y a une forte promiscuité (dans les nids ou terriers), ou l’hôte principal meurt et les puces cherchent alors à migrer sur un autre hôte vivant. Où et quand ces conditions se présentent-elles? Ou alors, existe-t-il un autre mode inconnu de migration des puces entre hôtes ?
Il y a là de véritables questions à portée scientifique. Que pour l’instant aucun des impétrants new-yorkais ne s’est posé. Notons que c’est la même question qui n’a pas été traitée dans l’étude concluant à des épidémies de peste en Europe 15 après un été chaud et humide en Asie… (voir  https://bloghyform.wordpress.com/2015/02/26/a-propos-de-l-etude-sur-les-gerbilles-les-rats-et-la-peste/ ).

La seconde info qui fait un buzz, c’est le plan pour affamer les rats de NYC avec 32 millions de $. Non, il ne s’agit pas de leur donner à manger des billets qui, n’en doutons pas, seront attribués à ceux qui savent y faire en politique et bizness, mais de repenser complètement la gestion des ordures et certains aménagements de sous-sols, notamment pour trois quartiers.

Actuellement, les new-yorkais sont invités à sortir leurs sacs à ordures directement sur le trottoir à partir de 16h, sacs qui sont ramassés par les camions poubelles à 6h le lendemain. Autrement dit, on met le couvert pour les rats quand il se réveillent, et on leur débarrasse la table au moment où ils vont se coucher… Sans compter que le sol de bien des caves d’immeubles est en terre battue, où les rats creusent en abondance leurs terriers.
Comme le téléphone du Rat Portail croule sous les appels et que de récentes études scientifiques forcément neutres et  bien intentionnées affolent les populations, il a été prévu:

  • D’obliger les immeubles de plus de 9 appartements à sortir leurs ordures au plus tôt à 4 h du matin (pour un ramassage à 6h) ;
  •  D’augmenter la fréquence de collecte des ordures dans les parcs ;
  •  De bétonner le sol des caves d’HLM encore en terre battue ;
  • De fournir 336 poubelles de compactage en métal.

D’où une première question : Quelle efficacité attendre de ces mesures ?
Pas grand-chose, sauf pour les immeubles aux caves bétonnées. En effet, l’installation et la prolifération des rats dégout, les surmulots, dépend de deux choses : la nourriture et la nidification. Le simple fait d’empêcher les rats de creuser ou aménager des terriers suffit à les chasser, même si la nourriture est abondante. Démonstration avec le témoignage du représentant de la ville de Zurich lors du « Séminaire sur la gestion des rats » organisé par la ville de Paris le 16 juin 2016 : « Dans les secteurs rénovés du réseau d’égout, il n’est plus enregistré de plaintes liées au rats, alors que la gestion des déchets est inchangée. »

C’est bien ce sujet qui est interpellant dans le projet new-yorkais : Pourquoi traiter le problème de la nidification seulement dans quelques HLM et pas dans les égouts, où vivent 75 à 80% des rats urbains ? Rénover, en les bétonnant, les parties vétustes du réseau, c’est l’assurance de faire chuter les effectifs de rats. Or, il n’y a rien de la sorte dans le projet. De l’art de traiter un problème à moitié…

Par contre, forcer la majorité des new-yorkais à se lever entre 3h30 et 3h45 pour sortir leurs sacs poubelles sur le trottoir, est-ce bien raisonnable / réalisable ? C’est un coup à perdre plein de voix…  Il serait si simple de renouveler l’initiative du préfet Poubelle en obligeant les syndics à équiper leurs immeubles de containers fermés… Parce que 336 poubelles « compactantes » pour 8 millions d’habitants… Cela revient à une miction dans un violon.
De toute façon, même si ces dispositions aboutissaient réellement à une diminution significative des déchets sur les trottoirs, il en restera suffisamment pour nourrir encore des hordes de rats, puisqu’ils ne mangent chacun que 25g par jour (l’équivalent de 10% de leur poids).

Ce qui entraîne une deuxième question : Comment ces mesurettes peuvent-elles coûter 32 millions de  $ ? Et là, je n’ai pas de réponse…

Au fait, la tonitruante annonce du plan de stérilisation des rats (société SenesTech, voir par exemple ici : https://www.wired.com/2017/04/nycs-newest-weapon-rats-sterilization/) a fait long feu. Ben, oui, c’était un projet irréalisable.

Pierre Falgayrac

mardi 18 avril 2017

Les rats éprouvent-ils des douleurs lors d'une intoxication fatale aux anticoagulants ?

Cette question, et sa réponse, sont en jeu dans le bien-fondé de la pétition de Mme Benchetrit "Stoppez le génocide des rats", qui fait l'objet d'un précédent article de ce blog.

Commençons par préciser que les rats sont bien plus hémophiles que d'autres mammifères et que l'action des anticoagulants sur leur organisme n'est pas la même que sur des chiens ou des humains.

Poursuivons en exposant un trait comportemental des rats bien connu par ceux qui ont à faire avec eux (les dératiseurs, comme ceux qui en élèvent pour l'agrément ou le laboratoire) : une souffrance physique ou "psychologique" est toujours accompagnée de cris, dont l'intensité est liée à celle de la douleur ressentie (de petits gémissements à des cris suraigus).

Ce fait est manifeste lors de brèves luttes entre dominants et dominés (accès refusé à la nourriture, à une femelle en œstrus...), lors d'une capture dans un piège-nasse ou lors d'un pincement sévère, et non mortel, dans une tapette.

De mon expérience de dératiseur, confirmée par les clients que je rencontre lors de mes formations ou lors de salons professionnels, les rats empoisonnés aux anticoagulants (ou AVe) s'affaiblissent progressivement, se déplacent de plus en plus en plus lentement, s'alimentent de moins en moins, mais ne présentent aucun signe de souffrance autre que celui lié à un état de fatigue intense. En tout cas, il n'y aucun signe de douleur.

Or, voici l’explication scientifique de l'intoxication par le Docteur Romain Lasseur, d'IZIPEST:

"Les Ave après s’être fixés dans le foie inhibent le recyclage de la vitamine K1 nécessaire à la bonne coagulation du sang. Néanmoins, l’individu (mammifère, oiseaux) dispose d’environ 4 jours de stock de vitamine K1 dans l’organisme. L’individu ne recyclant plus la vitamine K1 vit sur son stock pendant 4 jours.

Après 4 jours, la vitamine K1 venant à manquer (les apports extérieurs par la nourriture ne suffisent pas), la coagulation du sang (nécessaire au maintien de son état semi-solide semi-liquide) dysfonctionne, et le sang devient plus liquide et commence à sortir des vaisseaux pour aller remplir la cavité intra-péritonéale. L’organisme devant faire face à cette perte de volume sanguin, il rapatrie le sang périphérique pour soutenir les fonctions vitales (cœur cerveau poumon) et c’est donc au cinquième jour que les muqueuses se décolorent. Ensuite, l’animal ne pouvant plus faire face à cette hémorragie, il se met en veille (coma) avant de succomber.

L’animal meurt alors qu’il est dans le coma. Malgré un état de mal-être de l’animal avant d’entrer dans le coma, il n’y a aucun signe de souffrance de l’animal."

Il n'est donc pas question d'hématome cérébral et des douleurs et pertes d'équilibre qui l'accompagnent chez les hommes,  puisque le sang descend dans la cavité intrapéritonéale qui entoure les viscères des rats. Que ce phénomène s'étale sur 4 ou 8 jours ne change rien au ressenti des rats.

Quant au coma, il est tout sauf douloureux. Je sais de quoi je parle, les médecins m'y ont plongé 5 jours pour m'éviter de trop souffrir après mon accident de moto.

En résumé, l'empoisonnement aux anticoagulants ne provoque pas de douleurs chez les rats et personne ne peut qualifier de souffrance leur état de fatigue croissant jusqu'au coma et la mort.

Je reprendrai ces éléments dans un prochain article pour Le Supplément Mensuel Technique de la Dépêche Vétérinaire, le magazine à comité de lecture pour lequel j'écris une série d'articles sur la biologie et l'éthologie des murinés.


Pierre Falgayrac
www.hyform.fr

jeudi 9 mars 2017

Grippe aviaire : prenons-nous le problème par le bon bout ?




Wikipédia nous dit : La grippe (ou influenza) est une maladie infectieuse fréquente et contagieuse causée par trois virus à ARN de la famille des Orthomyxoviridae ( Myxovirus influenza A, B et C), touchant les oiseaux et certains  mammifères dont le  porc, le phoque et l'être humain.
L’influenza aviaire H5N8 provoque les dégâts que l’on sait dans les élevages de volailles du sud-ouest, tandis que le virus est également identifié dans la faune sauvage un peu partout en France.
Une recherche sur les communications scientifiques asiatiques fait apparaître des éléments totalement ignorés par le législateur français et ses experts, et les journalistes qui évoquent la situation.

Il s’agit, pour commencer, d’un article de 2009 intitulé « Fears of bird-to-rodent H5N1 relay » et écrit par Terry Mabett, en ligne ici : http://www.wattagnet.com/articles/559-web-exclusive-fears-of-bird-to-rodent-h5n1-relay

On y lit : « Des scientifiques gouvernementaux ont inspecté les fermes infectées et signalé des filets et des revêtements suffisants pour exclure les grands oiseaux migrateurs, mais pas les petits rongeurs comme les rats et les souris. Dans trois fermes, des dizaines de poulets morts se trouvaient dans les zones les plus éloignées des entrées de la coopérative, suggérant que les oiseaux sauvages n'étaient pas la source directe d'infection.

(…) Le professeur Toshihiro Ito, de l'Université Tottori, a déclaré au journal national Ashi Shimbun: « Il est possible que de petits rongeurs comme les rats emmènent le virus dans les poulaillers».

(…) Les rats et les oiseaux se mélangent librement autour des étangs, des lacs, des rivières et des réservoirs agricoles. 
(…) Des recherches en laboratoire montrent que les virus H5N1 sont pathogènes pour les souris. Un isolat H5N1 de l'épidémie de Hong Kong de 1997 a montré des titres élevés de virus dans les poumons de souris infectées et a tué tous ceux inoculés. Les isolats de poulet de H5N1 se reproduisent à des titres plus élevés chez les rats que les souches de virus H5N1 provenant d'autres sources.

L’autre article, d’Andrew R. Dalby et Munir Iqbal, est « The European and Japanese outbreaks of H5N8 derive from a single source population providing evidence for the dispersal along the long distance bird migratory flyways », publié en 2015 ici : https://peerj.com/articles/934/.

 

Il y est rappelé que « des études ont montré qu'il (le virus) peut être transmis à des furets et des souris, et des anticorps ont été détectés chez les chiens domestiques (Kim et al., 2014 ). »

 

Après avoir indiqué que la source originelle de contamination est probablement unique (et sibérienne), les auteurs soulignent :

 -     « la plupart des cas récents se produisent près de la côte et dans les zones où il y a des lacs et des sites connus pour leur faune sauvage et les oiseaux migrateurs ;

-          la Dispersion du virus par des voies de migration exige toujours qu’il y ait une infection relais pour que le virus de se propage sur de très longues distances migratoires (…) de sorte qu'il se propage parmi les oiseaux sensibles aux points de haltes migratoires, afin de fournir la prochaine étape dans la transmission. Ceci est observé avec la présence d'un nombre croissant de cas aux points d'arrêt, tels qu’au Pays-Bas. » 

Et suggèrent :

-           « (une) surveillance environnementale des échantillons de matières fécales dans les zones où les oiseaux migrateurs se rassemblent. »

 

Par ailleurs, on ne compte plus les cas d’élevages qui enchaînent abattages/ désinfection/ abattages / désinfection.

 

Comment se fait-il que le législateur qui, au nom du sacro-saint principe de précaution, impose des zones  de « protection » de 3 et 10 km (sans tenir compte des reliefs et vents dominants), et des procédures d’abattages ubuesques (transports des volailles à abattre), n’ait toujours pas imposé :

-          une recherche de la présence du virus sur la faune fréquentant les point d’eaux où se posent les oiseaux migrateurs ;

-          la dératisation des élevages condamnés à l’abattage leurs pensionnaires ?

 

Faut-il rappeler comment a été découvert le mode de transmission de la peste ? En 1898, Paul Louis Simon, médecin militaire, place un rat sain dans une cage ou venait de mourir un rat pesteux. Le rat sain contracte la maladie alors qu’il n’avait pas été en contact avec son prédécesseur. P. L. Simon s’intéresse alors aux puces présentes dans la cage et découvre que ce sont elles le réservoir de la bactérie (alors qu’à cette époque la communauté scientifique doutait que les insectes puissent être vecteurs de maladies…). Cet exemple montre que les explications, et donc les solutions, ne se trouvent pas toujours là où règne la pensée unique (l'abattage des volailles et des oiseaux sauvages, par exemple).

 

L’impasse faite sur les souris et rats qui infestent bien des élevages contaminés par l’influenza est coupable.

Les études démontrant leur sensibilité au virus établissent le risque de contamination d’un local d’élevage. Il convient donc d’intégrer des opérations de dératisation aux process de décontamination des élevages infectés.


Des désinfections sans véritable dépeuplement préalable n’ont pas de sens, si ce n’est celui d’une gabegie...

 

Pierre Falgayrac